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samedi 22 juin 2013

La Voix du Nord


Roger Gouvart s’en est allé, un livre del’histoire de Cappelle-la-Grande se ferme

Publié le 21/06/2013
Par OLIVIER TARTART - PHOTO ARCHIVES JEAN-CHARLES BAYON 



Cappelle-la-Grande est en deuil. Éloigné de son fauteuil de maire depuis le mois de septembre, suite à des problèmes de santé, Roger Gouvart s’est éteint jeudi soir. Le maire historique de Cappelle-la-Grande aura marqué de son empreinte «sa» commune, et au-delà, par son goût de la justice sociale et son engagement pour la vie associative. Par sa gouaille, son franc-parler et un caractère entier qui ne laissait pas indifférent. Ses obsèques sont prévues mardi. Son cercueil sera visible dès 10 h au Palais des arts, avant qu’un cortège, à 15 h 30, ne le conduise jusqu’à sa dernière demeure.
Ancien patron des dockers et maire de Cappelle depuis 1983, Roger Gouvart est décédé jeudi soir.LOCVDN
Impossible d’avoir rencontré Roger Gouvart sans avoir été marqué par le bonhomme. Même ses détracteurs s’accordent sur la personnalité hors norme de celui qui était maire de Cappelle-la-Grande depuis trente ans. Cappelle, « sa » ville, celle qu’il a métamorphosée, cité de 9 000 âmes aujourd’hui connue pour sa vitalité associative, la gratuité de l’école et des actions culturelles, sans oublier le centre aéré très prisé des jeunes générations cappelloises.

Ce goût de la justice sociale, Roger Gouvart le tenait sans aucun doute d’une enfance difficile. Né le 30 novembre 1928 à Rosendaël, il était fils de Victor, docker, et de Lisa Riem, originaire de Poperinge (Belgique). Le Front populaire avait marqué le garçonnet de 8 ans, dont les sœurs aînées avaient participé au mouvement de grève de la filature Marix. De son propre aveu « guère amoureux de l’école », Roger Gouvart avait particulièrement souffert du divorce de ses parents, suivi d’un placement dans un orphelinat de Bailleul. Il racontait volontiers le sentiment de révolte qui l’avait animé durant cinq années, « marquées par le règne des caïds et par l’injustice ». Protecteur des plus faibles, il avait fini par se faire respecter…

Avant d’être Cappellois, Roger Gouvart a été Dunkerquois. Dans une cité dévastée par la Seconde Guerre mondiale, il avait participé au déblayage des ruines et des rues, œuvrant au sein de la société Nord-France pour monter des logements provisoires sur le terre-plein du stade Tribut. Quittant Rosendaël avec sa famille en 1946, il rejoint les Glacis et ses baraquements, où il noue une indéfectible amitié avec le père André Delepoulle. Roger Gouvart devient traceur-coque aux Chantiers de France, où il collabore, non sans fierté, au redressement des pétroliers Seine et Saône. Le jeune homme de 16 ans se passionne pour le cinéma et pour la lecture, Zola et Hugo en tête. À 17 ans, il rencontre Eliane, dans un estaminet de Dunkerque. Cinq enfants naîtront de cette union, endeuillée par le décès brutal d’Éliane en 1968.

Carté CGT, Roger Gouvart s’engage en politique. En 1953, il est élu conseiller municipal, devenant alors le plus jeune conseiller municipal de France, à 25 ans. Surtout, il devient docker occasionnel sur le port de Dunkerque. S’y forge une réputation solide de « celui qui ne se laisse pas marcher sur les pieds » et une image de héros prolétarien. Une « grande gueule », ou un caractère entier, c’est selon, qui en font un personnage incontournable du port.

Fort du soutien de ses camarades, il est élu secrétaire général de la Chambre syndicale des ouvriers du port (CSOP-CGT) en 1968, succédant au charismatique Lucien Duffuler. Le port, « son » port, il n’a cessé de se battre pour lui. Même si, après avoir lâché les rênes du syndicat en 1983, il a assumé la réforme portuaire de 1992. Celle qui a si profondément divisé les dockers. Celle qui a été alors portée par son fils Bernard, dont il avait fait l’un de ses successeurs potentiels avant qu’il ne décède brutalement en 2004.

Un décès qui marque profondément Roger Gouvart, réélu maire de Cappelle-la-Grande en 2008 pour un cinquième mandat, dès le premier tour, avec 64 % des suffrages. 

Les Cappellois n’oublient pas tout ce que « Roger », ou « monsieur le maire » a fait pour la cité. 

Le Palais des arts, construit en plein champ, comme temple de la culture locale. Le Palais de l’Univers (devenu le PLUS), pour accéder à la culture scientifique, celle que chérissait le lecteur assidu de Science & Vie.

Le caractère entier et la gouaille qui, selon ses proches, cachaient un cœur plus grand qu’il ne voulait bien laisser paraître, manqueront désormais aux Cappellois, orphelins du « père » de leur cité. Plus qu’une page de l’histoire de Cappelle qui se tourne, il semble bien que c’est un livre tout entier qui se ferme.

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